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L’épreuve du réel : on invente un dispositif, pour inventer, inventorier une part de réel.
Parce qu’on a le sentiment qu’il nous échappe. (Parce que le marché culturel a mis sur la touche les artistes, les exilant de leur monde, de leur mode d’être au monde - la présence - pour les assigner à résidence, à production, à efficience. Et parce que, plus les agglomérations urbaines s’étendent, moins il y a de « découvertes », d’espaces de frôlement, de surprise et de rencontre. Parce qu’on n’a plus le droit de se taire et que, plus on prétend communiquer, s’adresser, plus on perd le goût de parler. Le goût de l’immédiat. Le goût de ce tout petit risque qui est « le goût des autres » et l’exercice de soi…
Tenir dans le regard, soutenir le regard, tenir dans l’écoute, soutenir l’écoute sont au centre du dispositif. C’est un exercice, réciproque, une épreuve de confiance. Elle commence, pour nous, comme pour chacune, chacun, dès le seuil. Quand il faut échapper à la question, ne pas répondre et joyeusement sauter par-dessus tout pourquoi. (Pourquoi je, ou tu, fais ça ? Pourquoi tu me parles ? Pourquoi je te réponds ?…)
Et le réel, alors, pour partie, en retour, nous invente...
Gislaine Drahy